Destinée au départ à se jouer en période estivale, la CAN 2025, organisée par le Maroc, devrait se disputer plus classiquement durant les mois d'hiver sur les pelouses du Royaume. Derrière ce nouveau glissement, des jeux d'influence plus ou moins souterrains sont à l'œuvre. Décryptage.
Le monde du football africain guette la fumée blanche du côté du Caire, au siège de la Confédération africaine de football. Avec cette question : quand donc aura lieu la CAN 2025 ? Attribuée au Maroc après la défection de la Guinée, cette trente-cinquième édition ne s'est toujours pas vue attribuer de date dans le calendrier déjà passablement chargé du football international. Pourtant, le voile se lève petit à petit, et ces derniers jours, la CAF a annoncé que le tirage au sort des éliminatoires aurait lieu le 4 juillet prochain, à Johannesburg. « 48 nations, dont les quatre vainqueurs du tour préliminaire (Tchad, Eswatini, Liberia et Soudan du Sud), seront réparties en 12 groupes de quatre équipes », a précisé un communiqué officiel, qui annonce le coup d'envoi des éliminatoires pour le mois de septembre 2024. La programmation de la CAN 2025 devrait être connue d'ici là, mais que le processus aura été long et laborieux.
Le Maroc, pays hôte de l'épreuve, souhaitait que celle-ci se déroule « à l’été 2025, conformément à la haute sollicitude royale ». La prolongation de Walid Regragui, dans la foulée de la dernière phase finale en Côte d'Ivoire, avait été l'occasion de réaffirmer cet objectif. Pourtant, il paraît de plus en plus certain que la CAN 2025 n'aura pas lieu durant la période estivale. Dans son édition du 12 juin, The Guardian indiquait que l'épreuve pourrait être reportée à décembre 2025. Selon les informations du quotidien britannique, le comité d'organisation souhaiterait que le tournoi débute à la mi-décembre et se termine un mois plus tard. Ces dates viendraient certes en collision avec celles du Boxing Day en premier League (dont 17 des 20 clubs ont cette saison envoyé des joueurs en phase finale, rappelait le Guardian) mais préserveraient le calendrier de la Ligue des Champions nouvelle formule, avec des rencontres programmées dès la deuxième quinzaine de janvier.
La CAF rétropédale...
La semaine précédente, des propos, prêtés par Reuters au secrétaire général de la CAF, Véron Mosengo Omba, laissaient entendre que le report à la période hivernale était déjà acté en haut lieu. La Confédération avait ensuite pratiqué le rétropédalage. « Des discussions sont en cours entre les parties prenantes pour trouver un terrain d'entente sur les dates. Le comité exécutif de la CAF se réunira pour discuter et prendre une décision prochainement », avait temporisé Lux September, le communicant en chef de l'instance panafricaine, sur le réseau social X (anciennement Twitter). Pour rappel, aucune date n'a jamais été officialisée, même si la Fédération royale marocaine de football s'était donc un peu avancée en écrivant que « la 35e édition de la CAN [...] sera(it) disputée au royaume durant l'été 2025 ».
Ces affirmations, le président de la Confédération africaine de football, Patrice Motsepe, avait tenu à les relativiser durant le point de presse tenu à Abidjan à l'occasion de la dernière CAN. « Je ne vais pas faire d'annonce, nous le ferons en temps voulu. Mon message pour le peuple du Maroc et le peuple de l'Afrique est que la CAN de l'année prochaine sera un immense succès », avait alors répondu le dirigeant sud-africain. Une prudence compréhensible : durant ce même été 2025, la FIFA organise son premier grand Mondial des clubs à 32 équipes, du 15 juin au 13 juillet aux États-Unis. Avec quatre clubs issus de la zone CAF et pléthore de joueurs africains engagés dans les 28 équipes d'autres Confédérations, beaucoup de potentiels participants à la CAN se mettraient dans le rouge s'ils devaient enchaîner une seconde compétition de quatre semaines dans la foulée.
La FIFA a un plan
Et ce n'est pas du côté de la FIFA qu'il faut espérer une clarification. Si les prochaines éditions de la Coupe du monde, de la Copa América ou de l'Euro y figurent déjà, nulle trace en revanche des CAN 2025 et 2027 sur le Calendrier International des Matches (IMC), publié par l'instance internationale « après consultation des parties prenantes concernées » et « pour une période de quatre ou huit ans. » Si la CAN 2025 devait se disputer début 2026, ce ne serait jamais que la troisième phase finale consécutive à ne pas se dérouler durant l'année correspondant à sa dénomination officielle : la CAN 2021 a eu lieu début 2022 au Cameroun, la CAN 2023 deux ans plus tard, soit début 2024, en Côte d'Ivoire. Et si l'on élargit la focale, ce ne serait jamais que la septième phase finale consécutive de la CAN à ne pas se disputer aux dates initialement prévues.
Mais la FIFA, qui a imposé son Mondial des clubs format XXL, n'en pense pas moins. Car au-delà de ces « glissements » successifs, la CAF doit toujours faire face à la volonté déclarée de Zurich de voir la CAN, désormais jouée avec 24 équipes, s'aligner sur l'Euro et ne plus se disputer qu'une fois tous les quatre ans. « Je propose d’organiser la Coupe d’Afrique des Nations tous les quatre ans plutôt que deux ans pour la rendre plus viable commercialement et plus attrayante au niveau mondial », avait déclaré Gianni Infantino, le président de la FIFA, en février 2020. « La CAN génère vingt fois moins que l’Euro. Avoir une CAN tous les deux ans, c’est bien au niveau commercial ? Cela a développé les infrastructures ? », s’était interrogé le dirigeant italo-suisse, avant de lâcher : « Réfléchissez à la passer à tous les quatre ans ! » Depuis lors, le tabou n'a pas sauté mais les réflexions vont bon train.