
Le M23 renforce ses rangs à mesure de ses conquêtes territoriales. Samedi 22 février 2025, à Bukavu, dans le Sud-Kivu, le groupe armé a présenté des milliers de "volontaires", venus gonfler ses rangs de l'armée et de la police.
Ex-soldats et policiers ou civils : à Bukavu, grande ville de l'est de la République démocratique du Congo (RDC) dont il a pris le contrôle depuis une semaine, le groupe armé M23 a présenté samedi 22 février 2025 des milliers de "volontaires" venus intégrer les rangs de son armée et de sa police.
Aux journalistes, tous disent s'enrôler "volontairement", sans qu'il soit possible de le vérifier.
Le M23, soutenu selon des experts de l'ONU par près de 4 000 soldats rwandais, a lancé fin janvier une offensive-éclair dans l'est de la RDC, s'emparant notamment de Goma puis de Bukavu, principales villes des provinces des Nord et Sud-Kivu.
Au Cercle sportif de Labotte de Bukavu, des policiers jusqu'ici membres de la police nationale congolaise reçoivent leurs nouvelles tenues. "Ce qui nous a suffisamment motivés" à intégrer les rangs de la police des nouvelles autorités "c’est de voir la mauvaise gouvernance de notre pays", expliquent en chœur Pascal Chilumba et Augustin (qui refuse de donner son patronyme), 52 et 50 ans, respectivement jusqu'ici lieutenant et sous-commissaire de la police nationale à Bukavu.
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À leur côté, des civils venus s'enrôler, dans la police ou dans l'Armée révolutionnaire congolaise (ARC) du M23, par vocation ou opportunité, assurent-ils. "Rejoindre la police (...) c'était ma vocation. Ça fait un temps que je rêve d'être policier afin de protéger la population congolaise et ses biens", affirme Claude Cikuru Mulikuza, âgé d'une trentaine d'années.
Francine, la vingtaine, évoque "le manque du travail" qui l'a mise dans "une situation difficile et poussée à faire n'importe quoi pour subvenir à (ses) besoins". Elle se voit désormais déjà "en train de règlementer la circulation routière".
Les soldats des Forces armées de RDC (FARDC) qui n'ont pas fui l'avancée du M23 - débandade accompagnée de pillages et d'exactions - ont été rassemblés au siège de la 33ème région militaire pour intégrer les rangs de l'ARC du M23.
"Ceux qui sont devant vous, ce sont nos compatriotes congolais, des volontaires venus s'inscrire pour être policiers, pour être militaires afin de défendre le Congo à travers l'Armée révolutionnaire congolaise", a expliqué à la presse Lawrence Kanyuka, porte-parole politique du M23. Selon lui, cette "première étape" de recrutement dans la zone concerne 1 800 policiers et 750 militaires qui changent d'uniforme, ainsi que 1 320 civils hommes et femmes.
Nouvelles recrues et anciens policiers embarquent dans des bateaux sur le lac Kivu. Destination : la province voisine du Nord-Kivu, les premières pour une formation, les seconds pour un "recyclage".
Aux anciens policiers ré-enrôlés, rassemblés devant un commissariat avant d'embarquer, le général Bernard Byamungu, chef d'état major adjoint du M23, a reproché d'avoir trempé dans "des désordres", ce "alors que c'est vous policiers qui sont proches de la population".
"Merci d'avoir refusé de fuir avec les voleurs. Vous avez accepté de nous attendre et (...) que nous travaillons ensemble", a-t-il néanmoins ajouté. "Vous avez été paupérisés" par le gouvernement de Kinshasa, a-t-il poursuivi, "nous devons mettre fin à cette injustice" et "plus question pour un policier d'être clochard dans son pays". Vous "serez des policiers modèles", a-t-il assuré, "nous sommes une armée du peuple et non (...) un refuge des malfrats", a martelé le général Byamungu.