Les tumultueuses relations France-Algérie sous l'ère Macron

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Les tumultueuses relations France-Algérie sous l'ère Macron (1)
Photo d'archive. Cérémonie de signature d'un accord entre les présidents français Macron et algérien Tebboune à Alger, 27 août 2022.
(Ludovic Marin, Pool via AP)
Mis à jour le
25 mars 2023 à 12:46
par TV5MONDE avec AFP
Le 24 mars, les présidents français Emmanuel Macron et algérien Abdelmadjid Tebboune tournent la page d'une énième crise à l'issue d'une conversation téléphonique. Un retour à la normale dans les relations diplomatiques est en cours et le chef de l'Etat algérien est attendu en France au mois de mai. Chronologie d'une relation en dents de scie.

Le président français Emmanuel Macron, qui a aplani vendredi une brouille avec l'Algérie sur l'exfiltration d'une militante franco-algérienne, entretient comme ses prédécesseurs une relation diplomatique tumultueuse avec l'ancienne colonie. Voici un retour sur cette relation en dents de scie.

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  • Février 2017 : "Crime contre l'humanité"

En février 2017, Emmanuel Macron, alors candidat à l'élection présidentielle, déclare que la colonisation de l'Algérie est "un crime contre l'humanité". "Ca fait partie de ce passé que nous devons regarder en face en présentant aussi nos excuses à l'égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes", dit-il.  

En décembre, devenu président, il se rend en Algérie et promet de restituer les crânes d'insurgés algériens tués au XIXe siècle par l'armée française, ce qui sera fait en 2020. L'Algérie et la France doivent avoir "des relations beaucoup plus développées qu'aujourd'hui", dit-il, en appelant à ne pas rester "otages" du passé.

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  • Janvier 2021 : "Actes symboliques" après le rapport Stora

Après la publication d'un rapport de l'historien français Benjamin Stora, en janvier 2021, M. Macron s'engage à des "actes symboliques" pour tenter de réconcilier les deux pays, mais il exclut cette fois "repentance" et "excuses".

Début mars 2021, il reconnaît, "au nom de la France", que l'avocat nationaliste Ali Boumendjel a été "torturé et assassiné" le 23 mars 1957 par l'armée française, contredisant la thèse officielle d'un suicide.

En septembre 2021, il demande "pardon" aux harkis, combattants musulmans engagés auprès de l'armée française ensuite "abandonnés" par la France. 

  • Octobre 2021 : Regain de tension, puis apaisement

Le 2 octobre 2021, Alger rappelle toutefois pour trois mois son ambassadeur à Paris, après des propos d'Emmanuel Macron selon lesquels l'Algérie, après son indépendance, s'est construite sur "une rente mémorielle" entretenue par "le système politico-militaire".

A la mi-octobre, M. Macron déclare que "les crimes commis le 17 octobre 1961 sous l'autorité (du préfet de police de Paris de l'époque) Maurice Papon sont inexcusables pour la République", 60 ans après le massacre ce jour-là de dizaines, voire de centaines de manifestants algériens pacifiques par la police à Paris. 

Paris annonce en décembre un accès élargi aux archives sur la guerre d'Algérie (1954-1962).

Le 19 mars 2022, commémorant le 60e anniversaire des Accords d'Evian (définissant les conditions de l'indépendance de l'Algérie), M. Macron se montre optimiste sur la "réconciliation des mémoires". 

  • Août 2022 : Relance du partenariat

Il se rend du 25 au 27 août en Algérie à l'invitation du président Abdelmadjid Tebboune et déclare que la recherche de "la vérité" et de "la reconnaissance" sont plus importantes que la "repentance". 

Les deux présidents s'engagent dans une déclaration commune "à inscrire leurs relations dans une dynamique de progression irréversible" et M. Macron salue "un partenariat renouvelé". 

En octobre, c'est la Première ministre française Elisabeth Borne, accompagnée d'une quinzaine de ministres, qui se rend à Alger pour concrétiser la réconciliation par des accords dans l'industrie, la création de start-ups, le tourisme et la culture.

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  • Décembre 2022 : Fin de la crise des visas

En décembre, le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, annonce depuis l'Algérie un retour à la normale sur l'octroi de visas aux ressortissants algériens. A l'automne 2021, Paris avait restreint cette délivrance, pour inciter l'Algérie à faire des efforts en matière de coopération sur l'immigration illégale. Le taux de refus avait atteint 50%.

Le 30 décembre, M. Tebboune salue une nouvelle "relation de confiance" franco-algérienne et un "amitié réciproque" personnelle avec M. Macron. Le mois suivant, il annonce une visite d'Etat en France pour mai.

  • Février 2023 : Couac sur une "exfiltration"

Le 6 février 2023, la militante politique et journaliste franco-algérienne Amira Bouraoui -arrêtée en Tunisie et en passe d'être expulsée vers l'Algérie- obtient la protection du consulat français à Tunis et prend un vol pour la France.

Alger condamne une "exfiltration illégale" et rappelle son ambassadeur en France. 

Evoquant fin février sa stratégie en Afrique, M. Macron déclare qu'il continuera à "avancer" avec Alger.

  • Mars 2023 : Vers un renforcement de la coopération

Vendredi 24 mars, les présidents français Emmanuel Macron et algérien Abdelmadjid Tebboune ont officiellement tourné la page de la dernière crise diplomatique entre leurs deux pays, a annoncé l'Elysée qui affirme vouloir continuer à "renforcer la coopération" entre Paris et Alger aux relations très tumultueuses.

Les deux chefs d'Etat ont levé au cours d'un entretien téléphonique les "incompréhensions" liées à la brouille autour d'une militante franco-algérienne et sont "convenus de renforcer les canaux de communication (...) pour éviter que ne se renouvelle ce type de malentendus regrettables", a ajouté la présidence française dans un communiqué.

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La présidence algérienne a diffusé un communiqué identique à celui des Français. "Le Président Abdelmadjid Tebboune a informé le chef de l'État du retour en France de l'ambassadeur d'Algérie dans les prochains jours", selon le communiqué, confirmant des déclarations en ce sens de M. Tebboune cette semaine.

Par ailleurs, un nouvel ambassadeur de France en Algérie est sur le point d'être nommé, a fait savoir une source gouvernementale française.