Le préfet de police de la capitale de Madagascar a imposé un couvre-feu à Antananarivo courant de mercredi 15 novembre au soir jusqu’aux premières heures de jeudi 16 novembre, jour du premier tour de l'élection présidentielle. Le scrutin se prépare dans un contexte tendu.
"Face aux divers actes de sabotage qui se sont déroulés" au soir du mardi 14 novembre, "je vais sortir un arrêté d'ici peu instaurant un couvre-feu à partir de 21H00" (18H00 GMT) et "jusqu'à 04H00 du matin" (01H00 GMT), a annoncé, peu avant mercredi, le général Angelo Ravelonarivo lors d'une conférence de presse à Antananarivo.
Il a évoqué l'"incendie d'un bureau" de vote et "la destruction de divers matériaux électoraux". Le préfet a mis en garde contre des actions menant à de possibles arrestations avec "circonstance aggravante en cette période électorale".
Les Malgaches sont appelés aux urnes, jeudi 16 novembre, pour choisir leur prochain président. Les bureaux ouvrent à six heures du matin (03H00 GMT). Onze millions d'électeurs inscrits devront choisir entre treize candidats.
Le président sortant Andry Rajoelina, 49 ans, brigue un second mandat. Mais les tensions avec l'opposition, sur la grande île de l'océan Indien, sont vives. Dix opposants et candidats rassemblés au sein d'un collectif, dont les anciens présidents Hery Rajaonarimampianina et Marc Ravalomanana, ont appelé, mardi les, électeurs à ne pas voter. Ils contestent l'éligibilité d’ Andry Rajoelina après un récent scandale autour de sa double nationalité française et malgache Ils réclament une suspension du processus électoral.
"Nous refusons l'élection de jeudi et nous appelons tous les Malgaches à considérer que cette élection n'existe pas", a signifié, au nom du collectif le candidat et opposant, Hajo Andrianainarivelo, 56 ans. "Nous faisons appel à tous à ne pas voter", a renchéri un autre candidat, Roland Ratsiraka, 57 ans, en dénonçant une "supercherie".
Les opposants dénoncent aussi des irrégularités dans l'organisation du scrutin, notamment sur les listes électorales. Ils évoquent l'existence de "milliers de bureaux de vote fictifs".
Les membres du collectif ont refusé de faire campagne. Dans le même temps, le candidat du pouvoir, qui parie sur une victoire dès le premier tour, a rallié ces dernières semaines des milliers de soutiens aux quatre coins du pays où il s'est rendu en hélicoptère ou en avion privé.
Les opposants ont multiplié les appels à manifester à Antananarivo depuis début octobre. Les rassemblements, régulièrement dispersés au gaz lacrymogène, n'ont toutefois remporté le soutien que de quelques centaines de participants. Les opposants réclament une intervention de la communauté internationale. Ils ont annoncé leur intention de poursuivre les protestations dans les prochains jours. Le gouvernement du dirigeant sortant a plusieurs fois condamné une "volonté de renverser le pouvoir" et accusé l'opposition de "menacer la stabilité du pays".
Indépendante depuis 1960, l'ancienne colonie française compte parmi les pays les pauvres au monde. Elle a rarement connu une élection qui ne soit précédée d'une transition militaire ou suivie de contestations.
Le scrutin, initialement prévu le 9 novembre, a été reporté d'une semaine le mois dernier à la suite de la blessure d'un candidat lors d'une manifestation. Washington et l'Union européenne ont exprimé leur "préoccupation" et dénoncé un usage disproportionné de la force contre l'opposition. Élu en 2018, Andry Rajoelina a accédé au pouvoir en 2009 à la faveur d'une mutinerie qui a chassé Marc Ravalomanana.