Il est des dates qui restent à jamais gravées dans les esprits, endeuillant à jamais une nation. Au Sénégal, le 1er décembre 1944 en est une. Dans le camp de Thiaroye, plus de 1600 tirailleurs africains se font tirer dessus par ceux-là même qu'ils étaient partis défendre sur le front européen : l'autorité coloniale française. Ils seraient plusieurs centaines de victimes. Récit d'un massacre
Plus de 1.600 tirailleurs - d'anciens prisonniers de guerre des Allemands qui avaient participé aux combats de 1940 - avaient été rassemblés à Thiaroye fin 1944. Il ne s'agissait pas seulement de Sénégalais, mais d'hommes venus d'autres possessions françaises en Afrique.
Le 1er décembre 1944, deux semaines après leur arrivée dans le camp et alors qu'ils réclamaient le paiement de leurs arriérés de soldes et diverses primes et indemnités de combat, les forces coloniales leur ont tiré dessus.
Les autorités françaises de l'époque avaient admis la mort d'au moins 35 personnes. Plusieurs historiens avancent un nombre de victimes bien plus élevé, jusqu'à plusieurs centaines.
Le président Faye avait envisagé cette année la possibilité d'une future demande d'excuses de la part de la France.
"Reconnaître qu'on a perpétué (perpétré) un massacre évidemment doit avoir comme incidence de s'amender. Sans être dans la surenchère, nous pensons que de façon naturelle, c'est ce qui doit suivre", a-t-il dit.
Avec ces commémorations, les nouvelles autorités sénégalaises rompent avec les précédentes. Elles sortent "le Sénégal du silence coupable et complice, fermement imposé par la France aux régimes successifs", dit l'historien et président du comité de commémoration Mamadou Diouf.
"Ces braves hommes ont été massacrés alors qu'ils étaient désarmés. Leur seul tort a été de réclamer des pécules comme il en avait le droit à l'image de leurs frères d'armes français", a dit M. Faye.
"Ils n'ont pas reçu des pécules. Ils ont reçu des balles. Ce n'est pas parce qu'ils ont reçu des balles que ces pécules ne sont plus dus. Ils restent dus, à ces hommes de Thiaroye comme ils ont été payés à leurs frères d'armes français", a t-il ajouté.
Il a salué le fait que, selon lui, "la France collabore parfaitement avec le comité envoyé (en France par le Sénégal) pour l'exploitation des archives qui n'ont pas été jusqu'ici ouvertes".
"Nous sommes en train de faire des pas de géants dans la manifestation de la vérité quant aux circonstances de ce massacre", a-t-il déclaré.
Le président français Emmanuel Macron a reconnu jeudi 28 novembre 2024 que les forces coloniales françaises avaient commis un "massacre" contre des tirailleurs africains en 1944 près de Dakar, a indiqué le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye qui a salué un "pas important" vers la vérité dans un entretien avec l'AFP.
"J'ai reçu aujourd'hui (jeudi) du président Emmanuel Macron une lettre dans laquelle il reconnaît que c'était un massacre, de façon très claire, sans ambiguïté sur les termes", a dit M. Faye au palais présidentiel à Dakar trois jours avant des commémorations auxquelles les nouvelles autorités sénégalaises entendent conférer un relief particulier.
"La France a reconnu ce massacre comme elle ne l'a jamais fait", a-t-il dit.