Somalie: élections locales "historiques" dans la région du Puntland

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Mise à jour le
25 mai 2023 à 19:56
par AFP Par Mustafa HAJI ABDINUR

Des milliers de personnes se sont déplacées jeudi dans l'Etat semi-autonome somalien du Puntland pour participer à des élections locales "historiques", premier vote au suffrage direct en plus de 50 ans dans ce pays de la Corne de l'Afrique.

Région aride du nord-est de la Somalie riche en pétrole et ancien épicentre de la piraterie somalienne, le Puntland a déclaré son autonomie en 1998 et nourrit des relations tendues avec le gouvernement central de Mogadiscio.

De longues files d'attente se sont formées à travers la région dès l'ouverture des bureaux de vote, à 05H00 du matin (02H00 GMT). Les gens sont "ravis de cette expérience", a déclaré à l'AFP Hassan Suleyman, électeur de 22 ans de la ville portuaire de Bosaso, se réjouissant d'un jour "spécial".

"Les gens sont très heureux malgré les longues files d'attente", a assuré de son côté Warsame Mohamed, qui a voté dans le district de Ceelaayo.

Les partenaires internationaux de la Somalie (dont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Norvège, l'UE, l'ONU, la Russie, l'Arabie Saoudite, Turquie...) avaient salué dès mercredi ce scrutin "historique", affirmant que "l'expérience du Puntland en matière d'élections directes a le potentiel (...) pour inspirer l'expansion de la démocratie à travers la Somalie, à tous les niveaux de gouvernement".

Exception faite de la région séparatiste du Somaliland, aucune élection ne s'est tenue en Somalie selon le principe d'"une personne, une voix" depuis 1969 et la prise de pouvoir du dictateur Siad Barré.

Les élections se tiennent selon un complexe système indirect basé notamment sur le clan, composante de base de la société somalienne.

"Exerçons notre liberté"

Plus de 387.000 électeurs étaient inscrits pour choisir parmi 3.775 candidats, dont 28% de femmes, aux conseils de district de cette région du nord-est de la Somalie, selon des chiffres officiels. Sept partis étaient en lice.

La commission électorale transitoire a toutefois reporté le vote dans trois districts sur 33, dont la capitale Garowe, invoquant des problèmes sécuritaires, sans donner plus de précisions.

L'Etat semi-autonome somalien du Puntland

Carte du nord de la Somalie montrant la région autoproclamée indépendante du Somaliland, l'état semi-autonome du Puntland et la zone revendiquée par les deux territoires

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Cléa PÉCULIER, Valentina BRESCHI

"Le Puntland grave son nom dans l'histoire", s'est félicité jeudi dans un communiqué le président de la commission électorale Abdirisak Ahmed: "Chaque individu détient le pouvoir de faire la différence par son vote. Profitons de cette occasion capitale et exerçons notre liberté de choix, façonnant un avenir qui nous unit tous".

Pays instable de la Corne de l'Afrique, la Somalie fait face depuis 2007 à une sanglante rébellion menée par les islamistes radicaux shebab.

Elle vit aussi au rythme d'aléas climatiques extrêmes récurrents, dont une sécheresse historique débutée fin 2020 et des inondations ces dernières semaines qui ont déplacé des centaines de milliers de personnes.

Ce scrutin local au Puntland se tient en amont d'élections législatives et régionales prévues en janvier 2024.

Le président somalien Hassan Cheikh Mohamoud, élu en 2022, a promis en mars que les prochaines élections nationales et régionales se tiendraient sur le principe "une personne, une voix".

Inquiétudes de l'opposition

Malgré l'enthousiasme qui entoure le scrutin au Puntland, certains membres de l'opposition ont régulièrement exprimé leurs inquiétudes et accusé le président de l'État, Said Abdullahi Deni, de manipuler le processus électoral.

Sécheresse et famine dans la Corne de l'Afrique

Carte de la situation alimentaire entre février et mai 2023 (projection) en Afrique de l'Est, selon le Réseau des systèmes d'alerte précoce contre la famine

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Cléa PÉCULIER

Le mandat de Said Abdullahi Deni doit prendre fin en janvier et l'opposition redoute qu'il ne tente de changer la Constitution du Puntland pour se maintenir au pouvoir.

Une coalition d'opposition, qui s'est réunie mi-mai, s'est insurgée contre "toute tentative d'ouvrir un processus de révision de la Constitution à ce stade de la période de transition, alors que le mandat est sur le point d'expirer pour le Parlement et le gouvernement".