La population tchadienne est appelée aux urnes, ce lundi 6 mai, pour élire son nouveau président. Cette élection doit mettre fin à une transition qui aura duré trois ans, depuis le décès d’Idriss Deby Itno, tué dans l’ouest du Tchad lors d’une offensive des rebelles du Fact, en avril 2021. Ce scrutin se joue sur fond de tensions politiques.
Dix candidats, 9 hommes et une femme, mènent campagne depuis trois semaines pour cette élection présidentielle. Plus de 8 millions de Tchadiens sont attendus dans les bureaux de vote pour élire leur nouveau président.
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Mahamat Idriss Déby, l’actuel président de transition, a été installé par les généraux de l’armée tchadienne. Il s'était engagé à rendre le pouvoir aux civils, au bout de 18 mois de transition. Trois ans plus tard, le fils Déby cherche à légitimer son pouvoir et s'affranchir de l'héritage de son père. Grand favori de l'élection présidentielle, le "général président" a d'ores et déjà annoncé qu'en cas de succès, il promet de ne pas faire plus de deux mandats successifs, dans un entretien accordé à France 24. Ses détracteurs qualifient ce scrutin de "grande mascarade".
Lydie Beassemda est la seule femme à se présenter à la présidentielle. Déjà candidate en 2021, cette ingénieure en industries agro-alimentaires et présidente du Parti Démocratique du Tchad (PDI) est rompue à l'exercice. Son programme repose sur le fédéralisme et la défense du droit des femmes. En 2021, elle était arrivée en 3e position, derrière Albert Pahimi Padacké, également candidat à la présidentielle de ce lundi 6 mai. Il défend les couleurs du Rassemblement national des démocrates tchadiens (RNDT - Le Réveil).
Mahamat Idriss Déby, lui, est soutenu par une coalition de plus de 210 partis politiques, dont le MPS, fondé par son père. Ce parti est au pouvoir depuis plus de 30 ans.
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Les autres candidats sont Baltazar Alladoum Djarma, Théophile Bebzouné Bongoro, Mansiri Lopsikréo, Brice Mbaimon Guedmbayë, Nasra Djimasngar et Yacine Abdramane Sakine.
Les déclarations de candidature à cette élection ont dû être déposées avant le 15 mars dernier. Le Conseil constitutionnel avait reçu 20 dossiers. Il n’en a finalement retenu que 10, les autres ayant été jugés “irrecevables” et “non conformes” par l'institution.
Certains candidats écartés ont appelé au boycott du scrutin, au sein du GCAP, le Groupe de concertation des acteurs politiques, ainsi que des organisations de la société civile et des syndicats. Le mouvement dénonce même une certaine "confiscation du pouvoir" par le clan Déby.
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La jeunesse tchadienne semble vouloir s'exprimer dans cette élection. Mais, une partie de celle-ci ne possède pas de carte électorale ou n’est même pas inscrite sur les registres.
Le premier ministre, Succès Masra, l'un des trois candidats à l'élection présidentielle, est accueilli par une grande foule de partisans à son arrivée à un rassemblement de campagne dans la ville de Moundou, le 28 avril 2024.
Les tensions entre candidats, notamment entre Mahamat Idriss Deby et Succès Masra, n'ont cessé de croître pendant cette campagne. Un bureau du parti des Transformateurs aurait été incendié fin avril à N’djamena. Le camp Masra dénonce également des arrestations arbitraires de certains de leurs militants.
Dans un communiqué publié le 2 mai, des ONG, comme La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) ou encore la Ligue tchadienne des droits de l’Homme (LTDH), se sont dites “préoccupées par la situation des droits humains et la crédibilité du scrutin”. Elles appellent à la venue “d’observateurs internationaux pour veiller au bon déroulement de l’élection” au Tchad, afin d’éviter une nouvelle crise politique.
Pendant la durée de la transition, le pays a connu des épisodes particulièrement violents comme la répression sanglante des manifestations contre la transition en octobre 2022 ou encore la mort d’un des opposants à Mahamat Idriss Déby, son propre cousin, Yaya Dillo, lors d’un assaut de l'armée au siège de son parti.
Ce scrutin est attendu depuis longtemps par les Tchadiens, qui resteront certainement attentifs à l'attitude des candidats à l'annonce des résultats.